Exposé de Monsieur Boucher, Président Fondateur de l’ASEOR, lors de la cérémonie organisée par l’ASEOR pour ses 40 ans, le 5 octobre 2013, à la Bouvêche.

Messieurs les Maires,

Mesdames, Messieurs,

1 – HISTORIQUE DE L’ASEOR

Bienvenue à tous.

L’ASEOR fête, cette année, ses quarante ans d’existence. A cette occasion, il m’a été demandé de vous présenter l’historique de notre association : sa création, son mode de fonctionnement. Le plan suivi comportera la description de l’environnement de la ville d’Orsay, les atteintes à cet environnement qui ont conduit à la création de l’ASEOR. Puis, je vous dirai quelques mots sur les grands principes de son action.

Comme son nom l’indique l’ASEOR est une association de Sauvegarde de l’Environnement d’Orsay. La ville d’Orsay bénéficie d’un environnement assez exceptionnel qui la rend particulièrement agréable à vivre. Un certain nombre d’éléments contribue à la qualité de cet environnement :

  • une situation géographique naturelle à l’entrée de la verdoyante vallée de Chevreuse de grande réputation touristique,
  • la nature de son urbanisme avec en particulier un bâti traditionnel de qualité (constructions en meulières) et en grande partie pavillonnaire ce qui a pour conséquence directe de permettre une large mixité sociale avec une grande diversité de professions : des universitaires, des cadres moyens et supérieurs, des employés de l’industrie, du commerce, des artisans y côtoient des ouvriers, des retraités de toutes catégories en parfaite harmonie. Je peux même ajouter dans les années 1960-1970, la présence d’agriculteurs : une ferme existait rue Charles de Gaulle où le bon lait des vaches alimentait une partie des populations voisines, rue François Leroux où de grands terrains de culture de fraises participaient à l’approvisionnement des Halles de Paris.

Tous ces habitants sont soucieux de préserver l’environnement spécifique qu’ils ont choisi et façonné.

  • l’ambiance apportée par la présence d’un milieu scientifique de haut niveau : la faculté d’ORSAY de renommée mondiale,
  • la présence de bois et d’espaces verts couvrant des surfaces importantes.

Il n’est donc pas étonnant que la majorité des Orcéens tienne à conserver l’agrément de cet environnement avec, en particulier, son centre ville animé à l’allure de gros bourg encore au visage humain, avec ses jardins publics, ses lacs entourés de beaux grands arbres, avec les bords reposants et bien aménagés de l’Yvette incitant à des promenades agréables et tranquilles aux personnes de tout âge.

Voilà ce que l’ASEOR veut protéger et sauvegarder.

Jusqu’au milieu des années 1960, la ville d’Orsay a assez bien résisté au développement urbain galopant de la région parisienne. A partir de cette date, des atteintes à son environnement apparaissent. Je vais en citer deux :

  • la première, ouverture au Sud de notre cité, du chantier de construction d’une ville nouvelle qui deviendra en 1977 la ville des Ulis et qui comptera 25000 habitants. On ne peut pas dire que l’architecture des immenses tours en béton s’harmonise avec l’habitation pavillonnaire de Mondétour, tout proche. Un certain nombre de ces tours sont en démolition aujourd’hui ce qui prouve bien les erreurs du passé. L’absence totale, à cette époque, de moyens de transport en commun nuit profondément à la vie des habitants de ces quartiers d’Orsay, laissant l’automobile les polluer à son aise.
  • pour aborder le deuxième accroc à notre environnement, j’ouvre une petite parenthèse. Dans la description de notre environnement, je n’ai pas mentionné un point noir pourtant bien existant : le passage à niveau de la gare du Guichet, le PN 20, qui interrompait la liaison entre le sud et le nord en coupant une voie routière à grande densité de circulation. Sa fermeture au moment du passage des trains provoquait des bouchons mémorables et occasionnait des pertes de temps importantes. Il a été de plus, la cause de plusieurs accidents mortels. Plusieurs projets de déviation très locale ont été proposés, tous rapidement abandonnés, car pratiquement irréalisables. Mais la RATP imposant la fermeture de tous les passages à niveau pour des raisons de sécurité, la déviation définitive, qui sera la RN118 après avoir porté le nom de F18 au départ, prend une telle importance qu’elle devient une desserte radiale de Paris, en même temps  qu’une partie de la Francilienne, troisième périphérique autour de la capitale. Résultat : une circulation quotidienne intense, génératrice d’importantes nuisances. Notons que cette voie est restée pendant 10 ans après sa construction, sans la moindre protection phonique. De plus elle marque la cité d’une immense balafre du nord au sud et d’un échangeur en plein centre ville sur les bords mêmes de l’Yvette.

Au début des années 1970, les problèmes liés à l’urbanisation évoluent très vite. La municipalité demande, en 1972, une étude à l’Action Sociale de l’Essonne pour créer un document de synthèse devant servir de base à l’établissement du premier plan d’occupation des sols pour la ville d’ORSAY. Cette enquête était réalisée avec la participation des Orcéens pour recueillir leurs avis et opinions sur tous les problèmes concernant la vie de la commune : urbanisme, voirie, espaces verts, secteurs boisés, caractère des différents quartiers d’habitation, équipements publics, …

Les options alors retenues se résument ainsi :

« Orsay doit rester un lieu de calme et de verdure :

  • On doit y limiter l’accroissement de la population par l’application de règles rigoureuses, sans dérogations, qui pourront conserver le charme de la cité.
  • Il faut respecter le caractère de zones pavillonnaires (pas d’immeubles dans les zones pavillonnaires) ; limiter par ailleurs la hauteur des immeubles (pas d’immeubles de plus de quatre niveaux, c’est-à-dire R+3) ; préserver au maximum les bois, les espaces verts, les arbres.
  • Il ne faut pas donner la priorité à l’automobile : non à l’élargissement des chaussées, oui aux voies piétonnes.
  • Il faut interdire l’établissement de toute activité industrielle et les activités artisanales gênantes proches des zones d’habitation. »

Les projets municipaux présentés fin 1972 étaient en nette opposition avec le contenu de ce document :

  •  l’un consistait en la réalisation d’une voie Est-Ouest, en fond de vallée. Elle devait drainer la circulation depuis Palaiseau par le lac de Lozère, la Ferme du chemin, la rue Racine. Elle devait franchir la voie ferrée pour aboutir rue de Verdun au carrefour avec l’impasse de Verdun. Là, elle se ramifiait en deux branches : la première vers la Faculté et Gif-sur-Yvette empruntait la rue de Verdun. La deuxième vers le quartier des Vignes passait par la rue François Leroux et le chemin de la Gouttière.
  • l’autre avait pour objet d’urbaniser le quartier des Vignes à haute densité. C’était le projet CERIOZ dont la variante la plus ambitieuse comportait 1200 logements, révisé ensuite à la baisse à 900 logements.

Devant la présentation de ces projets, un groupe d’Orcéens se mobilise aussitôt et décide de se regrouper en association pour s’opposer avec plus de force à leur réalisation. Le 22 janvier 1973 l’ASEON est portée sur les fonts baptismaux de la Sous-Préfecture de Palaiseau. Il s’agissait bien de l’ASEON : Association de Sauvegarde de l’Environnement d’ORSAY Nord, car les quartiers concernés étaient au nord de l’Yvette. Une pétition est lancée aussitôt auprès de la population contre les projets ci-dessus. Elle recueille plus de 750 signatures en moins de 15 jours. Devant le succès de la pétition, la municipalité retire et abandonne ces projets.

En 1974, un projet de densification du quartier de la rue Charles de Gaulle doit entraîner un élargissement de cette rue de 12 à 14 mètres. L’ASEON organise une réunion des habitants de ce quartier et rédige un questionnaire détaillé pour connaître leur avis. Les réponses, en grande partie opposées au projet, sont portées à la connaissance de la municipalité. Le projet n’aura pas de suite en l’état. Des commerces nouveaux, des services se sont installés, mais sans modification de la configuration du quartier.

En ce qui concerne l’urbanisation, les soucis, les problèmes gagnent toute la cité. Un certain nombre d’habitants du Sud de l’Yvette, ayant eu connaissance des résultats obtenus par l’ASEON, souhaitent bénéficier des services d’une association déjà constituée et demandent à ce que sa compétence s’étende à toute la ville.

Le 2 décembre 1976 l’ASEON devient l’ASEOR.

Voilà donc pourquoi et comment est née l’ASEOR.

Pour que cet exposé ne soit pas trop long et ne devienne pas trop fastidieux, je vais simplement vous énumérer quelques actions et faire quelques remarques et réflexions sur les principes de fonctionnement de l’ASEOR :

  • ZAC du Centre : Aide apportée à une autre association qui s’opposait au réaménagement de l’îlot Dubreuil-Archangé (établissement Vigouroux),
  • RN118 : Lutte contre les nuisances sonores, murs anti-bruit. Participation à la campagne de mesures acoustiques demandées et obtenues par l’ASEOR. Opposition vigoureuse à son élargissement,
  • PN 20 : Appui à la réalisation d’une voie de substitution pour la déviation locale du PN20,
  • POS : Participation à l’établissement du plan d’occupation des sols de 1982 et à ses révisions : 1993 et 1998,

Bien d’autres actions ont été menées et je puis vous assurer que la vie quotidienne de l’ASEOR n’a pas toujours été : « un long fleuve tranquille »

2 – GRANDS PRINCIPES DE L’ACTION DE L’ASEOR

Auprès des habitants

S’inspirant d’une devise d’Aristote : « Les villes doivent être construites pour protéger et rendre heureux leurs habitants », l’ASEOR a adopté comme règle de fonctionnement de toujours tenir compte des désirs des habitants des différents quartiers concernés et de n’intervenir qu’avec l’accord de la majorité de cette population.

Si nécessaire des tracts d’information sont distribués et des pétitions organisées pour appuyer l’intervention auprès des décideurs.

L’ASEOR recherche également toute information concernant l’urbanisme, l’environnement. Elle en trouve notamment dans les contacts avec les autres associations locales, départementales, régionales (Ile de France Environnement, par exemple) et aussi dans les résultats d’enquêtes et sondages effectués sur l’urbanisme et l’environnement par divers organismes. Ce type d’enquête a toujours fait apparaître que 80% des personnes interrogées souhaitent un habitat individuel.

L’ASEOR fait également partie de l’UASPS, Union des Associations de Sauvegarde du Plateau de Saclay.

Auprès de la municipalité

La municipalité étant son interlocuteur privilégié, l’ASEOR a pour règle de s’efforcer de conserver des relations aussi bonnes et constructives que possible avec le Maire et son conseil municipal.

Encouragée par ses premiers résultats et par l’audience acquise auprès des habitants, l’ASEOR a voulu se manifester autrement que par une opposition systématique à des projets ponctuels et a demandé à participer, à titre consultatif, au développement urbain et à apparaître ainsi de façon constructive comme une force de proposition.

Toutefois il arrive forcément que des conflits apparaissent entre un pouvoir élu qui tient à atteindre ses objectifs et des organismes associatifs qui ont une vision différente sur un sujet donné, à un moment donné. Ce jeu entre le pouvoir et des contre-pouvoirs de différentes sortes est une des nécessités de la démocratie.

Position politique

Il y a lieu de préciser la position de l’ASEOR par rapport aux formations politiques. De par ses statuts, l’ASEOR est une association apolitique qui a toujours travaillé avec un souci d’indépendance totale sur le plan politique. Elle a renoncé à toute subvention de quelque organisme que ce soit. Elle ne vit que de ses cotisations, de dons, et du travail bénévole de ses adhérents. De ce fait, elle n’a pas un train de vie fastueux et ne peut se permettre de faire de la publicité. Elle compte surtout sur la réputation qu’elle a su acquérir par ses actions passées et sur le dévouement de ses adhérents.

Au cours de ces 40 années d’existence, l’alternance politique a joué plusieurs fois lors des élections municipales. L’ASEOR s’est toujours comportée de la même façon quelle que soit la municipalité en place.

Pour renforcer cette neutralité politique, si l’un de ses membres obtient une fonction de responsable municipal, départemental ou national, il perd son statut d’administrateur.

Respect de la réglementation

Pour maîtriser le développement de l’urbanisme, définir les plans d’aménagement des différentes zones de la ville, les règlements, les outils existent. Dans un premier temps le P.O.S. (plan d’occupation des sols) était cet outil. Il est remplacé maintenant par le P.L.U. (plan local d’urbanisme).

Pour son action l’ASEOR demande la possibilité de contrôler l’application des règles, notamment lors de l’attribution des permis de construire. C’est un devoir de vigilance pour que les constructions réalisées soient conformes à la  réglementation.

3 – L’ASEOR FACE A L’EVOLUTION DE SON ENVIRONNEMENT

Il est normal qu’une cité sous peine de mettre en cause sa pérennité évolue. Einstein le résume très bien dans sa citation : « La vie est comme une bicyclette, quand elle s’arrête, elle tombe ».

Mais l’ASEOR demande que cette évolution tienne compte :

  • des caractéristiques du cadre de vie auquel les Orcéens sont attachés,
  • de la nécessité d’améliorer ce cadre de vie en diminuant les nuisances de toute origine,
  • de l’identité de chaque quartier,
  • du respect de la propriété de chacun,
  • de l’avis de tous, après une large consultation, dans un esprit de réelle concertation et de coopération.

Voilà dans ses grandes lignes comment est née l’ASEOR, les raisons de ses engagements, les objectifs qu’elle a poursuivis, les conditions dans lesquelles elle a travaillé, les principes de base qui ont fondé son action. Tout ce travail de quarante années a-t-il porté ses fruits ?

L’ASEOR est assez tentée de le penser. La plus grande partie de la ville reste un habitat pavillonnaire. Les grands immeubles n’ont pas envahi notre horizon. Les espaces verts ont été assez bien préservés. Aucune zone d’activités ne s’est installée dans nos quartiers calmes. Bien sûr, tous ces résultats ne sont pas imputables à l’ASEOR, mais elle pense pouvoir en revendiquer une part très honorable.

Après le passé et le présent, l’avenir ?

Cette situation relativement satisfaisante aujourd’hui se maintiendra-t-elle encore longtemps ? Pour son environnement ORSAY est, bien entendu, tributaire, au  moins en partie, des communes voisines. Par exemple, le développement du plateau de Saclay n’est pas sans incidence sur la vie à ORSAY. Ce plateau est entré dans une phase d’urbanisation qui sera sans doute difficile à contenir malgré les assurances des pouvoirs publics. L’ASEOR trouve dommage que cette réserve d’oxygène constituée par ces milliers d’hectares d’excellentes terres agricoles, puisse un jour être vouée au bétonnage. C’est un nouvel exemple de développement inconsidéré de la région parisienne, alors que d’autres régions de France deviennent de véritables déserts.

Un autre point d’interrogation apparaît pour l’avenir : Orsay vient d’entrer dans une nouvelle organisation intercommunale : la communauté d’agglomération du plateau de Saclay qui est le plus haut niveau de ce regroupement de communes. Ce qui conduit à poser deux questions :

  • Une à la ville d’Orsay : quels sont les pouvoirs effectifs qui restent à notre municipalité pour gérer et maîtriser son devenir, en particulier dans les domaines de l’urbanisme et de l’environnement ?
  • Une autre à l’ASEOR. Dans un tel contexte, quel rôle pourra encore jouer une association comme l’ASEOR pour la sauvegarde de la qualité de la vie à ORSAY ?

Mais je ne veux pas terminer sur une note sombre et pessimiste. On dit que tous les problèmes trouvent une solution quand ils sont bien posés. L’ASEOR aidera à bien les poser et elle forme le vœu pour que nos instances dirigeantes actuelles et à venir trouvent les bonnes solutions pour que l’on puisse dire encore longtemps :

Il fait bon vivre à Orsay

Et fructueuse et longue vie à l’ASEOR !